lundi 15 juillet 2024

Balles perdues

 

Lundi 15 juillet 2024


Balles perdues ?


Il est en tout cas des balles qui se perdent. Pour les « progressistes »américains, c’est celle qui a manqué de peu Donald Trump samedi dernier au cours de sa campagne électorale. Pris sous le feu d’une arme automatique achetée légalement, il n’a eu qu’une oreille abîmée. Un pompier est mort, deux autres personnes étant grièvement blessées. Celui qui a de grandes chances de battre un Joe Biden tellement gâteux que le camp démocrate hésite à lâcher en pleine bataille, apparaît comme un miraculé, plus gonflé à bloc que jamais en vue du scrutin de novembre. Certes, la mort de Trump aurait fait de lui un martyr du populisme nord-américain, mais les Républicains de sa tendance auraient-ils pu en tirer profit en lui trouvant rapidement un remplaçant suffisamment charismatique ? On ne peut s’empêcher de penser à l’attentat manqué -au couteau- contre Jair Bolsonaro au Brésil, en 2018, alors qu’il était candidat à la présidentielle, tentative de meurtre qui a fait beaucoup pour son succès.

L’identité du tueur, qui a la bonne idée d’être un jeune blanc ayant déjà voté républicain, a été divulguée très vite : il s’agit d’un certain Thomas Matthew Crooks, rapidement abattu par la police, tel un vulgaire Lee Harvey Oswald. Pour l’instant, on ne sait pas grand-chose sur ses motivations ou ses éventuelles complicités. Rien que le nom du gars (« Crook » signifiant « escroc » en anglais) peut faire penser à une magouille. Les complotistes de gauche (ou libéraux, ce qui revient au même, surtout aux States) y verront une manœuvre de la pieuvre russo-sino-azérie pour faire gagner l’homme qui veut le repli des Etats-Unis sur eux-mêmes. Leurs homologues d’en face crieront au complot de l’État profond, qui aurait eu recours aux moyens les plus extrêmes après avoir échoué à neutraliser Trump par la voie judiciaire. Les négligences suspectes du Secret Service poussent en effet dans ce sens. Reste l’hypothèse d’un « loup solitaire », justicier de l’ombre à la manière du héros de Stephen King dans son roman Dead Zone (1979), homme de bien poussé à l’action meurtrière pour empêcher de nuire un candidat dément à la Maison Blanche.

Ce qui m’amène à l’autre balle perdue, mais celle-là n’a pas été tirée, en tout cas pas à ma connaissance. Le Petit Prince a en effet assisté sans trop de peine au défilé du 14 juillet, déplacé cette année sur l’avenue Foch en raison des Jeux Olympiques. Pas de Maxime Brunerie (tireur peu doué au demeurant, qui avait tenté d’abattre Chirac en 2002) ou de Caserio (plus heureux au poignard contre Sadi Carnot en 1894), pour nous débarrasser du chef d’État le plus nuisible de la Ve République, dont le dernier exploit a consisté à transformer le régime solide fondé par De Gaulle en pétaudière ingouvernable.

Bien sûr, il aurait fallu assister au bal hypocrite des hommages venus de tout bord, mais quelle satisfaction de savoir un tel psychopathe hors d’état de nuire ! Car si John Smith, le héros du roman de King, se résout à devenir un meurtrier, c’est parce qu’il est doué de prémonition, et qu’il prévoit que l’élection de Greg Stillson entraînera les États-Unis dans une guerre nucléaire avec la Russie. N’est-ce pas ce qui nous pend au nez avec le va-t’en guerre de l’Élysée ?


Au spectacle.


C’est un peu la résurrection du Bébête-Show, en plus drôle, à laquelle nous assistons depuis le soir du 7 juillet. Tous les camps, à l’exception du RN que sa demi-défaite (salvatrice, comme je le disais dans un autre article) a incité à adopter une posture toute en retenue, se livrent à un concours d’arrivisme politique, de magouilles, de tractations sordides et de disputes internes pour accéder au pouvoir.

Le NFP est déchiré entre ses radicaux et ses raisonnables, toutes ses composantes étant elles-mêmes divisées en différentes factions et querelles d’ego. Et on peut compter sur des lumières comme Rokhaya Diallo pour jeter de l’huile sur le feu en déplorant que la photo du groupe LFI soit trop blanche ! Au passage, un grand bravo à ma compatriote Huguette Bello, présidente communiste du Conseil Régional de la Réunion, dont je ne partage pas les convictions, mais qui a eu la sagesse de refuser une candidature à Matignon, dont la dimension lourdement symbolique et politiquement correcte avait un côté purement « gadget ». La seule chose sur laquelle ces enragés paraissent s’entendre est le refus de laisser la moindre responsabilité parlementaire au RN, qui est quand même le premier parti de France. C’est dire à quel point ces gens ne sont en rien des démocrates, et n’ont de « populaire » que le nom. On sait de quel côté est vraiment la haine.

Renaissance est partagé entre une coalition penchant à droite ou à gauche, tout en se faisant houspiller très injustement par Macron, Prince des Ingrats.

LR « canal historique » ne sait s’il faut monter sur le radeau de la Méduse gouvernementale, ou rester dans l’opposition.

Et dire que l’on se moquait des Belges, des Italiens ou des Allemands, qui mettaient des mois à se mettre d’accord pour former un gouvernement qui tienne la route ! Là, c’est mal parti pour mieux faire, d’autant plus que la culture du compromis n’est pas le fort de notre personnel politique, surtout à gauche. Et qui dit « compromis » dit souvent trahison des promesses électorales.

On verra déjà ce que donne l’élection, dans trois jours, du président de l’Assemblée Nationale…


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