mardi 5 novembre 2013
L’ « Alternative »
Bayrou/Borloo.
C’est LE grand
évènement politique du jour : le mariage tant attendu –les Français n’en
dormaient plus- du Modem et de l’UDI, les deux immenses partis du Centre. Le
meilleur commentaire nous vient de Nicolas Canteloup, ce matin sur Europe 1,
imitant les uns et les autres dans une parodie de cérémonie de mariage :
Voix
de Giscard d’Estaing : « Jean-Louis
Borloo, acceptez-vous de prendre pour époux François Bayrou ici présent, et de
rester unis jusqu’à ce que Sarkozy vous sépare ?
Voix
de Borloo : -Ouais ! J’peux aller au vin
d’honneur, maintenant ?
Giscard :
-François
Bayrou, acceptez-vous de prendre pour époux Jean-Louis Borloo ici présent…heu,
non, il est déjà au buffet…et de rester unis jusqu’à ce qu’une gamelle à Pau
vous sépare ?
Bayrou :
-Heu…j’ai
pas vraiment le choix, alors, oui !
Giscard :
-Je
vous déclare donc unis par les lois du Centrisme ! »
Blague à part, j’ai longtemps
cru que Bayrou représentait une alternative intéressante. Mais les lois de la
politique française sont telles qu’il n’avait aucune chance de sortir du
duopole UMPS et de ses satellites.
La crise bretonne vue par Mélenchon.
Comme le
rappelle Evariste dans sa chronique du site Respublica,
la rébellion bretonne des bonnets rouges fait référence à une insurrection de
1675, en réaction à un nouvel impôt levé par Louis XIV pour financer la guerre
de…Hollande ! Coïncidence amusante.
Plus
sérieusement, l’analyse de la crise bretonne faite dans son article rejoint
largement celle de Jean-Luc Mélenchon, faite ce matin sur France Info. De manière fort opportune, il rappelle que cette crise
est avant tout celle d’un modèle productiviste dépassé, et d’une stratégie de
développement qui date des années 1960-70. La Bretagne, région autrefois
déshéritée, en a longtemps bénéficié, au point d’avoir été l’une des régions à
ne pas avoir trop souffert de la crise des années récentes. L’agro-alimentaire,
après avoir fait son beurre en Bretagne à grands coups de subventions
publiques, de pratiques environnementales catastrophiques, sur la sueur d’un
prolétariat plus ou moins docile, va maintenant faire du profit ailleurs.
La solution
n’est pas, dit Mélenchon, dans une hypothétique renégociation des aides
européennes à l’export du poulet congelé, ou dans un alignement sur les
méthodes des porcheries et des abattoirs allemands, mais dans une reconversion
de l’activité vers le bio, la qualité, etc…Le tout planifié et accompagné par
les pouvoirs publics.
Mais avec quel
argent ? Et la Commission européenne acceptera-t-elle un programme aussi
étatiste et « anti-concurrentiel » ? Méluche à la réponse :
qu’ils aillent se faire foutre. Séduisant, mais pas simple…
Le scandale Ecomouv’.
L’affaire de
l’écotaxe et des portiques détruits par ses opposants fait revenir sur le
devant de la scène une affaire fort embarrassante pour l’ancien gouvernement
Fillon-Sarko. Suivant la méthode désormais systématique du PPP (partenariat
public-privé), la perception de la taxe a été confiée à la société Ecomouv’,
moyennant 20% du montant des sommes prélevées. Le retour à l’octroi et aux
fermiers généraux de l’Ancien régime : nos libéraux futuristes et
modernistes nous projettent toujours plus loin dans le passé.
Ce sont les députés
écolos qui ont « levé le lièvre » au parlement, à la grande joie du
gouvernement qui prétend maintenant renégocier le contrat. Comme Hollande a
renégocié le Traité Merkozy ? Et on
va nous faire croire qu’il vient juste d’en redécouvrir les termes ? Pendant
ce temps, l’UMP s’étripe à nouveau, Copé renvoyant la balle à une NKM autrefois
chargée du dossier, et qui jure qu’elle ne pouvait pas faire autrement. Pas
plus que le gouvernement actuel, qui a dû poursuivre la mauvaise affaire au nom
de la continuité de l’Etat. Bref, c’est la faute à personne. Quant aux Verts,
qui ont moins défendu l’écotaxe que la petite Léonarda, c’est une belle
occasion de botter en touche et redorer péniblement un blason plus que terni.
Si Ayrault
laisse tomber ce beau projet, l’Etat devra rembourser au moins un milliard
d’Euros à Ecomouv. S’il s’obstine à la relancer, ce sera l’émeute partout –et
parfaitement justifiée, au vu du contexte. A tous les coups l’on perd !
Arno Klarsfeld parle d’or.
Je ne m’attendais
pas à devoir dire un jour du bien dans ce blog du célèbre avocat à roulettes,
passé avec armes et bagages au sarkozysme et au sionisme bas de plafond –car il
existe à mes yeux un vrai, beau et grand sionisme, hélas moribond, mais tel
n’est pas le sujet.
Dans le Marianne du 26 octobre, l’ancien président du machin
appelé « Office français de l’immigration et de l’intégration »,
écrit ces mots très justes :
« Si
l’on respecte l’âge avancé chez les humains, on devrait pouvoir le faire tout
autant chez les peuples. Pas du tout ! Ne pas vouloir changer trop son
mode de vie, c’est être « réactionnaire » ! Et ceux qui jettent
du « réactionnaire » au visage de l’autre sont les mêmes qui
glorifient les peuplades qui ne veulent rien changer à leur mode de vie depuis
des siècles, qui ne veulent surtout pas se mêler au monde moderne ni se
mélanger, qui veulent garder leur rites de passage à l’âge adulte en se jetant
du haut d’une plate-forme, les chevilles attachées par des lianes […] ou en se
faisant piquer par des fourmis […]. Ceux qui, en France, sont d’accord pour que
les choses changent, mais un rythme d’omnibus, pas à un rythme de TGV, sont des
« fascistes » ou des « vichystes ». »
Bien vu, M.
Klarsfeld.
Gravity : Hommage tardif à Ray Bradbury ?
C’est en
écoutant la radio, il y a quelques jours, que j’ai appris la mort de Ray
Bradbury, qui date de juin 2012 ! Mieux vaut tard que jamais…En fait, à ma
grande honte, je le croyais déjà décédé. En tout cas, il a eu une longue vie,
une vie prolifique d’un point de vue littéraire, celle d’un pape de la SF
américaine, un genre dont je suis friand. J’ai repensé à Bradbury en allant
voir Gravity, d’Alfonso Cuaron, un
très beau film qui m’a rappelé une nouvelle du grand écrivain, intitulée Kaléidoscope (parue chez Denoël dans une
compilation intitulée L’Homme illustré). Ce
récit d’une douzaine de pages raconte le destin tragique d’une douzaine
d’astronautes que l’explosion de leur vaisseau a projeté dans l’espace. Nul
suspense, lié à un éventuel espoir de s’en sortir, dans cette histoire
bradburienne. Les hommes sont ici dispersés aux quatre coins de l’immensité
spatiale, condamnés à périr par manque d’oxygène. Certains passent le temps,
une fois la panique passée, à discuter de choses et d’autres, s’insulter
parfois, puis se réconcilier, avant que l’éloignement sidéral ne mette fin à
tout dialogue, laissant chacun seul avec ses pensées.
Un seul d’entre
eux reviendra sur Terre, pour brûler et finir en cendres au contact du bouclier
atmosphérique. Cet homme, Hollis, anticipe sa fin prochaine :
« Je
flamberai, pensa-t-il, et mes cendres se dissémineront sur les continents. Je
serai utile. Un tout petit peu, des cendres sont des cendres, elles seront un
apport pour le sol […] Je me demande si quelqu’un me verra ? »
Quelques lignes
plus loin, un petit garçon s’écrie :
« Regarde,
maman, regarde ! Une étoile filante ! […] Fais un vœu, dit la
mère, fais un vœu. »
Toute la force
poétique et l’humanité de Bradbury sont dans ces quelques lignes, une poésie,
une sensibilité, une intelligence qui m’ont conquis dès la lecture des Chroniques martiennes, que j’ai lues et
relues depuis l’âge de dix ans (ma « bible », car tout y est !),
avec bien d’autres romans (le formidable Fahrenheit
451) et d’innombrables nouvelles. En ces temps de délire égotiste, de
frénésie technologique et consumériste, de fanatisme et de barbarie, lire
Bradbury fait le plus grand bien à l’âme.
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