samedi 26 février 2011

Un taxi pour Tobrouk


samedi 26 février 2011

            Mobile pour préados : y a pas que le forfait qui débloque.
M6, avant-hier, se faisait l’écho d’une brave mère de famille portant plainte contre Orange. Elle avait souscrit un forfait bloqué à 17 euros par mois pour son rejeton, mais le gaillard a réussi à le faire « débloquer » par simple coup de fil ou mél auprès de l’opérateur. Puis, le charmant garçon s’est empressé de faire le plein de SMS surtaxés et autres gadgets ruineux. Bilan : 1600 euros à régler pour la maman. Tout le reportage a consisté à souligner, en chœur avec la mère indignée, la légèreté de l’opérateur, qui se refuse à endosser la moindre responsabilité dans ce déblocage intempestif. « Un simple mineur peut donc, sans contrôle, faire ceci ou cela…c’est aberrant ! ».
Pendant ce temps, en bonne place à l’image, le gosse en question, imperturbable, continuait à tripoter son joujou d’un air renfrogné et vaguement ennuyé. Qu’aurais-je fait à la place de cette mère ? Je me serais d’abord désolée que mon fils soit un filou doublé d’un petit con (car comment croyait-il ne pas se faire prendre, dès lors que c’est maman qui paie les factures ?) ; j’aurais ensuite privé de portable ce jeune crétin pendant autant de mois à 17 euros que m’a coûté cette plaisanterie, plus autres sanctions à inventer. Enfin, je me serais retournée contre Orange afin de récupérer un peu mes billes. Mais jamais, au grand jamais, je n’aurais permis à ce débile de figurer en bonne place à la télé ! Dans cette histoire, il n’y a pas que le forfait à débloquer dur.

            Un taxi pour Tobrouk.
Notre cher ami Kadhafi n’en a semble-t-il plus pour longtemps. Ses opposants, toujours plus nombreux et mieux armés, s’apprêtent à fondre sur Tripoli. Les chancelleries occidentales, France en tête, cherchent à rattraper leur relative inertie lors des crises tunisienne et égyptienne en redoublant de grands moulinets : menace de sanctions économiques, de poursuites devant le tribunal de La Haye, embargo, etc…Le cher client de naguère (à qui nous ne refusâmes rien lors de sa dernière visite chez nous, y compris le droit de nous insulter) est redevenu l’infâme criminel des années 1980. Mais Kadhafi ne veut pas finir comme un vulgaire Ben Ali ou Moubarak, conduit tremblant vers quelque exil doré. D’ailleurs, le voudrait-il qu’il aurait du mal à trouver la bonne adresse dans le concert d’hostilité qu’il suscite dans le monde entier. La Russie, la Chine, peut-être, comme au bon vieux temps ?
Après avoir lâché ses mercenaires africains tel un despote carthaginois, bombardé sa propre capitale, il se prépare une fin digne de Hitler ou de Ceaucescu. Peu de monde, à vrai dire, n’a vraiment intérêt à ce qu’il s’en sorte vivant. Mais les hommes d’affaires avisés ont déjà réservé leur taxi pour Tobrouk.

            Le Camp des Saints, 38 ans plus tard.
Il y aurait beaucoup à dire sur l’excellent roman de Jean Raspail, enfin réédité chez Robert Laffont, que je suis en train de dévorer. Rappelons seulement pour ceux qui n’en ont jamais entendu parler, pour cause d’omerta politiquement correcte, que ce livre publié en 1973 raconte l’anéantissement de l’Occident et de la race blanche par des hordes miséreuses et plus ou moins pacifiques venues du Tiers-Monde. Le lecteur en pensera ce qu’il voudra, en fonction de ses idées, de son expérience et de sa sensibilité. Mais c’est une œuvre authentique, écrite avec une rage fébrile et un talent que l’on ne trouve plus guère chez les écrivains français d’aujourd’hui, enfermés dans le triptyque « Moi, ma tête et mon cul ».
Le plus saisissant dans cette « anti-épopée », selon la propre expression de l’auteur, est le portrait lamentable d’une civilisation tellement veule qu’elle se laisse bouffer sans coup férir, intoxiquée par des décennies de consumérisme débilitant et de terrorisme intellectuel bien-pensant. Cela me rappelle ce passage de La Planète des Singes, de Pierre Boulle, lorsque les singes prennent le pouvoir avec des fouets pour seules armes.
Mais les Européens, n’en déplaisent à leurs élites mondialisées, n’ont plus envie de se laisser faire. Même leurs dirigeants doivent en convenir, sous peine de sanction électorale : le « multiculturalisme », ou communautarisme à l’anglo-saxonne, ça ne marche pas. C’était d’ailleurs le thème d’un débat diffusé sur France Ô jeudi dernier. Un débat très équitable. Le seul Yvan Rioufol, du Figaro, faisait face à Patrick Lozès (leader du CRAN, le lobby noir), à Pascal Blanchard, historien « spécialiste de l’Histoire coloniale et postcoloniale » (qui a servi de caution « scientifique » au film Hors-la-loi) et à une obscure sociologue franco-maghrébine à l’air revêche. Cassage de gueule verbal assuré.
Soyons clair, je n’aime pas Rioufol et sa Sarko-américanolâtrie. Mais là, j’ai eu pitié, et un peu honte pour la liberté d’expression dans mon pays, de voir en 2011 les dés aussi pipés que dans le roman de Raspail.
Mais encore une fois, le soixante-huitardisme que vomissait l’auteur du Camp des saints, triomphant en 1973, a pris du plomb dans l’aile. Le Benoît XVI imaginé par Raspail –une sorte de pantin christique et misérabiliste- n’a rien à voir avec le conservateur Ratzinger. Internet offre une large possibilité de contre-pouvoir aux médias dominants (les révoltés du monde arabe en savent quelque chose). La présence de plus en plus massive de minorités visibles, aux réclamations de plus en plus agressives, a favorisé une certaine prise de conscience des Européens quant au risque de devenir minoritaires chez eux. Moi-même, ex-militant de gauche antiraciste, je mesure le chemin parcouru depuis ma folle jeunesse.
Faut-il pour autant tomber dans le grossier panneau du bonimenteur de l’Elysée, qui nous offre un « débat sur la laïcité et la place de l’Islam en France » ? La lamentable foirade de l’identité nationale ne lui a pas suffi, il remet ça ! Le vieux coup de la diversion et du racolage électoral, c’est vraiment tout ce qui lui reste en magasin pour sauver les meubles en 2012. Le bilan du sarkozysme, dans tous les domaines, est catastrophique. Et ce n’est pas la moindre de ses fautes que d’avoir essayé, par tous les moyens, d’exacerber les tensions entre les Français tout en affaiblissant gravement l’autorité publique, en termes de moyens comme de prestige.
Pour l’Islam en France, nul besoin de débat. Il y a des lois, et une constitution laïque que nous devons appliquer fermement, sur tout le territoire. La laïcité, rien que la laïcité, mais toute la laïcité. C’est notre « Camp des Saints » à nous, Français. Et je ne compte pas sur Sarkozy, qui lui tant craché dessus naguère, pour le défendre.

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